Dynamiques et enjeux paysagers du Charolais

DYNAMIQUES

La comparaison des cartes et photos aériennes permet de révéler les évolutions du paysage.

Charolais - carte d'Etat-Major 1860
 

La carte d’État-major distingue plusieurs modes d’occupation du territoire : les bois (vert) occupent des mauvaises terres essentiellement sur les hauteurs, les prairies humides (gris-bleu) couvrent la majeure partie des fonds de vallées, le reste du territoire (beige) se partageant entre cultures et prés.
Le paysage traditionnel de polyculture évolue à la fin du XIXème vers une spécialisation vers l’élevage d’embouche de bovins de race charolaise. Les cultures se font alors plus rares au profit des prairies bocagères qui progressivement couvrent tout le territoire.

Le canal du Centre, appelé aussi canal du Charolais, construit de 1784 à 1793, est l’artère principale du transport de matériaux en provenance de Montceau et de Chagny. Il est concurrencé à partir de 1860 par la nouvelle ligne de chemin de fer, permettant un transport plus rapide.
Paray-le-Monial, point de franchissement de la Bourbince, implantée près de l’eau autour du monastère puis de la basilique, présente une silhouette groupée. Un faubourg caractéristique se développe entre la Bourbince et le canal.

Charolais - photographie aérienne 1950-1960
 

La photographie aérienne des années 1950-60 révèle un petit parcellaire agricole de toutes formes. Les prairies dominent mais de nombreux petits champs y sont intercalés. Les parcelles sont de petite taille, comprises entre quelques ares et de 3 à 5 ha pour les plus grandes. Quelques très grandes parcelles de plus de 10 ha apparaissent ici ou là.
Le maillage bocager est dense, les haies cernent chaque parcelle et bordent les routes et chemins. Les arbres sont régulièrement taillés, ce qui explique le faible développement de leur couronne.

À Paray, entre voie ferrée et canal, s’est développé un quartier lié à l’essor des céramiques (années 1930). De nombreuses extensions urbaines s’étirent dans toutes les directions, avec un habitat diffus très prégnant, dès les années 30.

Charolais - photographie aérienne 2016
 

En 2016 plusieurs évolutions marquent le paysage :

Une extension urbaine polarisée par les infrastructures

La RCEA (Route Centre Europe Atlantique) qui passe au nord de Paray-le-Monial a entrainé le développement d’une vaste zone d’activité au nord de la ville, jouant comme le canal puis la voie ferrée en leurs temps, un rôle moteur dans la polarisation du développement de la ville.
Dans le fond de vallée, habitat, équipements de loisir et sportifs ont pris place aux dépends des prairies humides. L’extension de Paray-le-Monial est importante, notamment vers le nord, la ville a multiplié sa superficie par dix depuis la carte d’état-major, couvrant aujourd’hui plus de 5 km² (dans le même temps sa population n’a été multipliée que par 2,7).

Agrandissement parcellaire et diminution des haies

Avec la mécanisation de la traction agricole, le parcellaire s’est agrandi, les parcelles sont comprises entre 4 et 10 ha. Le maillage bocager s’est également élargi mais si les arbres sont moins nombreux, ils sont moins élagués que dans les années 60 et possèdent donc une présence plus forte dans le paysage. Ce phénomène est particulièrement net au niveau des ripisylves. De nombreuses haies basses ont disparu, laissant derrière elles des arbres isolés au milieu des parcelles regroupées.

 

ENJEUX PAYSAGERS

Charolais bloc-diagramme enjeux paysagers
 

Pérenniser le maillage bocager

 

Le Charolais s’affirme par un bocage soigné, avec des haies basses taillées au cordeau, ponctuées d’arbres isolés de bonne stature. Le maillage de haies bocagères anime les versants et forme un premier plan de qualité le long des routes et des chemins. Ce bocage participe également à la mise en scène des villages dans leur site en étant partie prenante de leur écrin. Mais certains secteurs voient la création de très grandes parcelles de prés, où arbres et haies ont tendance à disparaître au profit du fil barbelé. Par endroits, de vastes parcelles de culture ouvrent également la maille bocagère. Les jeunes arbres sont par ailleurs rares dans les haies ou au milieu des parcelles. Les arbres isolés, majoritairement âgés, mériteraient d’être renouvelés. Une attention particulière est nécessaire pour le maintien du bocage qui contribue à la richesse et à l’attrait indéniable de ces paysages.

Pistes d’actions envisageables :

  • Remailler les prairies par des haies vives en cas d’ouverture trop importante.
  • Planter des haies et des arbres le long des chemins ruraux qui se dénudent.
  • Soigner l’entretien des haies.
  • Inclure des arbres de haut jet dans les haies.
  • Replanter des arbres isolés au sein des prairies.
  • Conserver les haies dans les ruptures de pente pour éviter l’érosion.
  • Faire porter l’effort sur certains versants bien visibles qui forment des ensembles.
 

Animer les lisières et veiller à la gestion des versants forestiers

 

À travers le Charolais des forêts et des bois modulent les vues, cernant de vastes clairières bocagères. Certains versants sont boisés. Les lisières prennent alors de l’importance dans le paysage, constituant les horizons. Si les lisières forment des murs végétaux trop opaques ou uniformes, les perceptions sont plus monotones. Il est donc intéressant de travailler les lisières forestières par une politique de plantation et de gestion adéquate (conservation de beaux sujets, éclaircies des plantations, choix d’essences variées…) qui permette d’animer le paysage. Garder une certaine transparence aux lisières permet aussi d’apporter une plus grande diversité, tout en évitant leur fermeture.
La gestion et les modes de plantations des versants forestiers constituent également un enjeu. Une vigilance s’impose vis à vis des plantations de résineux qui affirment des formes géométriques calées sur le parcellaire cadastral, artificialisant le paysage. La souplesse des formes et la diversité des transitions entre peuplements doit être recherchée pour obtenir des versants harmonieux. Les problèmes s’estompent dès lors que le peuplement retrouve une diversité, soit par des parcelles mixtes feuillus et conifères, soit par une gestion jardinée.

 

Pistes d’actions envisageables :

  • Préserver et dégager des arbres remarquables en lisière. Maintenir et renouveler les vieux arbres.
  • Mettre en valeur les carrefours forestiers.
  • Animer les lisières le long des axes routiers. Varier les essences sur les premiers rangs.
  • Moduler les lisières pour apporter une diversité. Éviter une gestion homogène des lisières sur de longs linéaires routiers ou le long des champs.
  • Privilégier les boisements mixtes ou feuillus sur les lisières les plus visibles.
  • Éclaircir les premiers rangs pour favoriser la perméabilité visuelle des lisières.
  • Privilégier les peuplements de feuillus et les peuplements mixtes sur les versants les plus visibles.
  • Privilégier des plages d’intervention forestière dont les limites épousent les formes des versants.
  • Limiter les coupes à blanc et les boisements mono-spécifiques.
  • Créer des secteurs de Transition (peuplement mixtes, essences variées) en limite des parcelles résineuses afin d’en atténuer l’impact visuel.

Mettre en valeur l’eau

 

De nombreux cours d’eau drainent ce territoire entre les collines, accompagnés des ambiances intimes de fond de vallons. Quelques étangs jalonnent l’unité offrant par endroit un miroir lumineux. Le canal du Centre crée un fil conducteur à travers les collines du Charolais et la vallée de la Bourbince. Il offre de longues perspectives mettant en valeur la rigueur de son tracé et un vocabulaire spécifique : berges, écluses, port, pont, chemin de halage. L’eau est une composante incontournable du paysage mais que finalement on voit peu. Toutes les occasions de la voir et de la côtoyer participent à l’attrait du paysage. Elle mérite donc d’être mis en valeur. L’ouverture visuelle des fonds de vallons permet de révéler la présence des cours d’eau (ligne d’arbre de la Ripisylve, ouvrage…). Le passage de l’eau aux abords ou dans les villages, sa présence dans les espaces publics, donne un formidable atout aux lieux (Charolles, Paray-le-Monial). Tout un petit Patrimoine lié à l’eau mérite d’être mis en valeur : biefs, rigoles, passerelles, fontaines, lavoirs, ponts, étangs… L’entretien des cours d’eau, leur accessibilité, la mise en valeur des ponts, la gestion des fonds et des ripisylves participent à produire un paysage attractif. Cela vient également appuyer la démarche Trame verte et bleue des liaisons écologiques.

 

Pistes d’actions envisageables :

  • Conserver l’ouverture des prairies dans les fonds de vallée et en pied de coteau.
  • Utiliser la politique Trame verte et bleue pour mettre en valeur l’eau et ses abords.
  • Gérer la ripisylve et la berge afin d’éviter l’enfrichement.
  • Maintenir une ripisylve dans les paysages ouverts.
  • Préserver des accès au cours d’eau.
  • Rétablir des chemins permettant de côtoyer l’eau. Acquérir des emprises foncières pour retrouver des accès publics le long des cours d’eau et à certains étangs.
  • Ouvrir des fenêtres sur l’eau depuis les routes et les villages.
  • Valoriser le passage de l’eau dans les bourgs et villages.
  • Gérer la végétation pour ouvrir des vues sur l’eau depuis les ponts. Mettre en valeur les vues sur la rivière.
  • Valoriser le petit patrimoine lié à l’eau : moulin, bonde, seuil, rigole…
  • Remettre le canal en contact avec le paysage environnant (gérer la végétation, effectuer des plantations d’alignement, dégager des vues depuis les ponts …) pour lui redonner un rôle principal dans le paysage.
  • Relier le canal avec les villages proches.
  • Valoriser le passage du canal en milieu urbain.

Veiller à la qualité des bâtiments agricoles et des fermes

Le bocage des collines du Charolais est voué majoritairement à l’élevage bovin charolais. De nombreuses fermes de bonne stature, bien visibles en Belvédère, constituent un patrimoine bâti remarquable à valoriser. De nouveaux hangars agricoles sont apparus, accolés ou non aux fermes anciennes, ou en périphérie des villages. Ces nouveaux bâtiments sont souvent en Unité paysagère à une autre.'>Rupture avec les bâtiments anciens, en raison de l’évolution des techniques et des normes. Leurs volumes, leurs matériaux ou leur couleur n’ont pas toujours fait l’objet d’une réflexion pour trouver une certaine harmonie avec leur situation et leur entourage. Leur localisation et leur qualité architecturale (volume, couleur…), ainsi que l’aménagement de leurs abords (plantations, chemin, transition avec les prés) peut participer à mieux inclure les nouveaux bâtiments dans le paysage.

 

Pistes d’actions envisageables :

  • Préserver et mettre en valeur les ensembles bâtis des fermes patrimoniales.
  • Veiller à l’harmonie entre les hangars et les bâtiments anciens.
  • Éviter les implantations de hangars trop visibles : en crête ou versants, en entrée de village ou en bord de route.
  • Soigner l’architecture des bâtiments (volumes, matériaux), fractionner les volumes.
  • Privilégier des bâtiments de teinte sombre, plus discrets dans le paysage.
  • Soigner l’entrée de la ferme. Planter des arbres isolés ou alignés le long du chemin d’entrée.
  • Planter aux abords des bâtiments pour faire une transition avec le paysage. Utiliser des essences locales adaptées au contexte.
  • Installer les stockages dans des lieux discrets en arrière-plan.
 

Mettre en valeur les centre bourgs et le petit patrimoine

 

La mise en valeur des espaces publics des villages et des bourgs ainsi que de leur périphérie constitue un faire-valoir important pour la qualité du cadre de vie. Les espaces publics (entrée, rue, place, venelle, tour de village…) sont des points stratégiques à valoriser pour conserver le cachet des lieux et sa convivialité. Certains villages ou bourgs sont au contact ou à proximité de l’eau, tissant des liens à mettre en valeur Les aménagements doivent faire preuve de simplicité pour préserver la tonalité rurale des lieux qui fait le charme des villages. Certains éléments de patrimoine (lavoir, mur, puits, calvaire, bâti…) ne doivent pas être oubliés. Des actions pour restaurer et redonner vie aux habitations anciennes délaissées, plutôt que de systématiquement construire en périphérie du bourg, sont à privilégier. Les entrées et les traversées des bourgs ou villages sont par endroit à améliorer pour valoriser le cadre de vie des habitants et parfaire l’image des villages. L’enjeu est de préserver ce qui a une valeur et de trouver une nouvelle harmonie avec les aménagements envisagés.

Pistes d’actions envisageables :

  • Aménager les entrées pour marquer une transition vers le village.
  • Préserver le cachet des places. Révéler l’histoire et soigner la qualité des aménagements. Trouver un équilibre entre stationnement et convivialité des espaces publics.
  • Privilégier l’utilisation de matériaux locaux dans les aménagements. Conserver un vocabulaire simple mais de qualité, en accord avec la ruralité des lieux.
  • Valoriser le patrimoine bâti dans toute sa diversité.
  • Favoriser l’occupation des maisons anciennes délaissées. Redynamiser l’habitat en centre bourg.
  • Valoriser les petits éléments de patrimoine (lavoir, muret, noue pavée, calvaire…).
  • Soigner les périphéries des villages en complément du centre ancien : plantations, chemin de tour de village, abords du cimetière. Préserver un maillage de chemins en périphérie des villages.
 

Composer les extensions urbaines et valoriser le site du village

 

Le relief ondulé du Charolais permet de voir facilement les villages groupés sur les pentes, donnant par endroit une image claire de leur implantation. L’urbanisation constitue un élément d’évolution très visible, mais surtout irréversible. Des extensions bâties mal positionnées peuvent altérer la Lisibilité de la silhouette du bourg. L’urbanisation linéaire et le Mitage desservent la qualité des paysages. Les nouvelles constructions mises en façade le long des axes routiers ou en périphérie du village transforment la Perception et l’identité des lieux. Il est donc important de réfléchir à la forme des groupes bâtis et à leur relation avec le relief, aux connexions avec le centre ancien ou encore au respect du site originel d’implantation du village.
Dans un autre registre et à une autre échelle des développements plus importants ont eu lieu à Charolles et à Paray-Le-Monial, incluant des zones d’activités et des lotissements conséquents. Il y a donc ici un fort enjeu de recomposition de ces différentes parties tournées sur elles-mêmes qui se sont agglomérés à une époque sans dialoguer avec leur entourage.
Les nouvelles activités commerciales et industrielles qui s’implantent le long des grands axes et des entrées de villes nécessitent une grande attention afin de veiller à leur qualité architecturale et paysagère ainsi qu’à l’aménagement de leurs abords (clôture, stationnement, aire de stockage…).

Pistes d’actions envisageables :

  • Prôner un développement durable et économe de l’espace dans les documents d’urbanisme.
  • Prendre en compte les logiques d’implantation du bourg dans son site, valoriser les éléments qui donnent au bourg son côté unique.
  • Préserver la silhouette groupée des villages.
  • Révéler le site d’origine d’implantation des villages en fonction du relief ou de la présence de l’eau. Mettre en valeur les vues en belvédère au niveau des villages.
  • Mettre en place des limites pérennes à l’urbanisation.
  • Porter une attention particulière aux routes d’accès et aux entrées en évitant de les coloniser par une urbanisation linéaire.
  • Renforcer le centre bourg plutôt que d’éparpiller des constructions le long des routes.
  • Ne pas penser qu’au pavillon individuel comme seul modèle d’habitat, promouvoir les maisons de ville ou le petit collectif.
  • Créer des quartiers harmonieux plutôt que des lotissements impersonnels.
  • Valoriser les abords des cours d’eau au contact de l’urbanisation
  • Qualifier et aménager les abords des zones de développement (zone commerciale, équipement, lotissement).
  • Accompagner les zones d’activités ou les sites industriels par un projet paysager de qualité. Imposer un plan de composition et un cahier des charges architectural et paysager. Maîtriser la publicité et les enseignes.
  • Soigner l’architecture des bâtiments (volumes, matériaux). Privilégier des bâtiments de teinte sombre, plus discrets dans le paysage.
  • Soigner les limites des zones d’activité. Disposer les aires de stockage et les parkings en retrait des vues. Planter aux abords des bâtiments pour faire une transition avec le paysage.
  • Créer des liaisons entre les différents quartiers nouvellement construits et ceux plus anciens.
 

Valoriser les routes, les chemins et les belvédères

 

Les routes côtoient tour à tour les fonds plus intimes et les hauts du doux relief, offrant des vues intimes ou plus lointaines sur les prairies bocagères. Des longs itinéraires remarquables, sur des lignes de crêtes (RD 33), ou suivant le Canal du Centre (RD 974), proposent une vision privilégiée de cette unité bocagère. La voie rapide RN 79 jouxte l’urbanisation et les zones d’activités.
L’enjeu est d’éviter un vocabulaire routier banalisant, de veiller à la qualité de vues (abords directs de la voie et gestion de la végétation) et à la perception des villages ou des bourgs ainsi qu’à leurs accès. Il est essentiel de maîtriser la qualité les abords de la voie, souvent sollicités par un développement urbain.
Sur les versants, quelques routes ou chemins en balcon offrent des vues en belvédère qui doivent être maintenues par une gestion suivie de la végétation arborée. Quelques belvédères offrent des vues panoramiques depuis le sommet d’une colline, comme l’emblématique Mont-St-Vincent, avec son Panorama à 360°. Ils nécessitent une maîtrise de leurs abords et de leurs premiers plans pour maintenir des vues de qualité. La mise en valeur des chemins de randonnée ou de balade, ainsi que la remise en état des chemins d’exploitation forestière, constitue également un enjeu important. Les nombreux évènements qui animent les parcours méritent d’être entretenus et mis en valeur : arbre remarquable, source, franchissement d’un cours d’eau, point de vue sur les vallons ou le village, aire d’arrêt …

Pistes d’actions envisageables :

  • Retrouver et maintenir des points de vue depuis les hauts.
  • Soigner les itinéraires en balcon en dégageant ou en préservant les vues. Aménager des points d’arrêts.
  • Maitriser la qualité des premiers plans le long des itinéraires. Soigner le bocage.
  • Mettre en valeur les carrefours.
  • Soigner les abords des ponts (dégager la végétation, créer des aires d’arrêt).
  • Mettre en valeur les petits évènements le long des parcours.
  • Réfléchir à l’accessibilité des points de vue, à l’aménagement de belvédères, la gestion de la végétation, la maîtrise des vues depuis les hauts.
  • Réfléchir à l’accessibilité du Mont Saint-Vincent, l’aménagement de belvédères, la gestion de la végétation, la maîtrise des vues depuis le sommet.
  • Améliorer les abords des zones d’activités en façade sur la route. Qualifier et aménager les abords des zones de développement (zone commerciale, équipement, lotissement) le long des voies pénétrantes.

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